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Les Amis de Morvarc'h
2 octobre 2021

Un anniversaire très spécial...

Bonjour les amis,

Il y a un an, le vent soufflait fort, très fort, et dans la mauvaise direction...

Vous le savez, il a eu raison de la lourde chaîne et de l’amarre de Morvarc'h, qui s'est échoué sur la cale près du feu rouge de Camaret...

Un grand pas a été fait depuis, une belle mobilisation a rassemblé près de 65 000 euros, ce qui permet de commencer une première tranche de travaux. Mais beaucoup reste à collecter encore ! Aidez-nous, partagez cette campagne, parlez-en autour de vous, contactez-moi pour me mettre en relation avec des entreprises susceptibles d'être intéressées par un mécénat dans la cadre de sa RSE : les dons sont déductibles des impôts !

https://www.helloasso.com/associations/les-amis-de-morvarc-h/collectes/reparation-du-vieux-greement-morvarc-h-lourdement-endommage-par-la-tempete-alex

Certains d'entre vous ont lu le récit d'une autre aventure de mer, "l'égo du capitaine" paru aux éditions "Notre presqu’île" par Brigitte Charoy :  une autre date inoubliable, il y a 11 ans, où Morvarc'h a bien failli disparaître avec son capitaine dans une mauvaise tempête au large de Molène...

La femme du capitaine nous livre ici en exclusivité sa version de l'histoire, l'autre côté, celle de la femme de marin écoutant la tempête, impuissante et pourtant impliquée concrètement au déroulement de cette expérience inoubliable... Il a fallu du temps pour la digérer et pouvoir la mettre en mots.

Le naufrage de Morvarc'h et la lutte pour le remettre à l'eau ont ravivé cet épisode…Je vous laisse le découvrir...

 

 

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Récit d'une nuit mouvementée, dont l'évocation me touche encore profondément, si longtemps après ! …

Depuis qu'il était en retraite, Jean aimait naviguer seul au large, afin de se ressourcer. Il avait trouvé un beau prétexte : aller à la pêche aux thons. Comme ceux-ci se trouvent en général, fin août- début septembre, près du "Banc de la Chapelle", site bien connu des anciens, il partait pour une semaine environ et le plus délicat, en cette période de l'année, était de trouver une fenêtre météo correcte durant cette escapade.

En 2008, il est donc parti, pensant avoir le temps de faire son périple et rentrer avant le mauvais temps annoncé ; mais la météo n'est pas une science exacte, même si les prévisions se sont bien améliorées !

Je le savais sur le retour, car nous communiquions grâce à son téléphone satellite. Une nuit, à 5H30 du matin, je suis réveillée par le téléphone qui sonne. Je n'aime pas beaucoup ce genre de chose, car je crains toujours le pire... Au bout du fil, j'entends un bruit de vagues impressionnant, des "glouglous" inquiétants et parmi tout ce brouhaha, la voix de Jean, à peine perceptible ; de plus je ne suis pas bien réveillée et ne comprends pas vraiment ce qu'il me raconte, car je l'imagine en train de couler : c'est l'horreur et mon cœur se met à battre la "chamade » ! Puis, je finis par me raisonner et écoute ce qu'il veut me dire: avec son calme légendaire il m'annonce qu'il a perdu sa barre, sa VHF ne fonctionne plus, il n'a presque plus d’unités sur son téléphone, il se trouve au large de Molène: il me donne son dernier point et il voudrait que j'appelle le Cross Corsen pour qu'ils repèrent le bateau sur leur radar et disent s'il dérive beaucoup ou s'il peut attendre qu'il fasse jour pour se sortir de cette mauvaise passe, il doit me rappeler 1/4H plus tard.

Aussitôt j'appelle le Cross : ils ne sont pas très à l'écoute de ce que je leur demande, ils s'inquiètent de savoir s'il faut déclencher les secours, mais c'est à Jean de les appeler en direct (j'imagine que les femmes s'inquiètent souvent trop vite et font déclencher les secours de façon injustifiée !). J'ai beau leur dire qu'il n'a pratiquement plus d'unités, que sa VHF ne fonctionne plus et qu'une fois qu'il m'aura recontactée, ce n'est pas du tout évident qu'il puisse les avoir en direct : je panique pas mal, car il me semble que je suis dans une impasse, que faire?

Je me suis assise dans un pouf, juste à côté du téléphone et j'ai attendu, attendu.... Cette attente m'a semblé interminable, mille idées les plus folles traversent mon cerveau : et si Morvarc'h allait se jeter sur le Plateau de Molène? Et si Jean sombrait avec son bateau dans cette mer en furie ? (J’entendais le vent souffler dehors et j'en tremblais de terreur). Et si en fait il ne restait plus assez d'unités pour les rappeler ? ETC...

Au bout de cette interminable attente, le téléphone a sonné vers 6H et j'ai expliqué à Jean, toujours aussi calme, alors que moi je bouillais intérieurement, que sa question n'avait pas été prise en compte et je l'ai poussé à les appeler pour leur demander de venir à son aide. Bien qu'en temps ordinaire il répugne à se faire aider, devant mes supplications, il a fini par accepter, pour mon plus grand soulagement ; mais il n'était pas encore sorti de cette mauvaise passe !

Avant de partir au travail, vers 8H, notre fille Gwénola m’a appelée pour savoir si son père était rentré ou si j'avais des nouvelles : elle n'avait pas dormi de la nuit, entendant tout ce vent qui soufflait en tempête, elle avait eu un mauvais pressentiment et  n'était pas fière de savoir son père au large dans ce mauvais temps.

 J'ai repris ma veille, toujours près du téléphone ! L'attente m'a parue encore plus interminable cette fois, mais elle le fut réellement. Pas moyen à cette heure-là de partager mon angoisse avec quelqu’un de ma famille, que je ne voulais d'ailleurs pas inquiéter.

J'ai fini par avoir un appel du Cross, vers 7h, je crois, me disant que le canot de sauvetage de Molène était parti à sa recherche. Ouf ! 1ère étape, mais ce n’était pas encore gagné : arriverait-il à temps ? Pourrait-il lui passer une remorque ? Je me suis rendue compte que je m'étais mise à prier, car je craignais vraiment beaucoup pour la vie de Jean. J'ai imaginé qu'il périssait ce jour-là et que j'allais venir gonfler le triste lot des veuves de marins disparus en mer....

Après le message du Cross, j'ai appelé ma nièce pour lui raconter ma "folle" nuit d'angoisse. Nous avons bien discuté et cela m'a fait énormément de bien, ça m'a bien apaisée. Un moment après, elle me rappelait pour me dire qu'elle avait eu son fils au téléphone. Ce dernier était en veille sur le "rail" de Ouessant à bord de l'Abeille Bourbon, il avait entendu le message du Cross et leur avait donné les caractéristiques du Morvarc'h (alors que j'avais bien pensé le faire !). Il lui a également annoncé qu'un Aviso de la marine était également à sa recherche. Bon 2 bateaux dans une mer déchainée avaient plus de chance de retrouver Jean, qu'un seul. Hum, je savais que l'on faisait tout pour le ramener à la maison.

Nouvelle longue attente interminable : ce n'est que vers 10h30, je ne sais plus très bien, que le Cross m'a prévenue que le canot de sauvetage voyait notre bateau, mais qu'en fait Jean avait refusé la remorque, par contre il avait accepté d'être guidé parmi les rochers du plateau de Molène, dont il s'était sérieusement rapproché pendant tout ce laps de temps.  Une fois que les secours ont été déclenchés, Jean, épuisé, était parti se reposer un peu, (je l'ai su après). Qui dans une telle situation aurait agi ainsi ? En fait, après un cours somme il avait retrouvé un peu ses esprits et en voulant mettre un peu d'ordre sur le pont, (c'était la "Bérézina"), sa barre était réapparue, bien amarrée à un bout qui trainait à l'arrière du bateau.  A partir de ce moment-là, j'ai pu prévenir : ma fille, ma nièce et ma famille, que le Morvarc'h faisait route vers Camaret.

J'ai beaucoup apprécié également le coup de fil du sémaphore du Toulinguet m'annonçant qu'il prenait la relève : le Morvarc'h passait la pointe St Mathieu et le canot de sauvetage rejoignait son port d’attache : ouf ! Quel soulagement ! Enfin je pouvais respirer, le plus dur était passé. Le sachant à bout de force, j'ai appelé mon beau- frère (qui, lui aussi s'inquiétait de savoir Jean en mer dans ce mauvais temps), afin qu'il aille à sa rencontre, pour l'aider si nécessaire. En fait, ils y sont allés à 3, avec sa sœur et son mari qui avait un Sangria, avec un moteur.

Ceux-ci m'ont prévenue quand Jean passait le Gouin ; même dans le Corréjou, les "moutons « étaient bien formés et la mer "fumait". Il arrivait, le cauchemar prenait fin : il était vivant et rentrait sain et sauf à la maison, quel bonheur ! Ils l'ont aidé à prendre son mouillage, car ses mains étaient tellement gonflées par une semaine dans l'eau de mer et le froid, qu'elles n'étaient plus très habiles pour serrer les bouts. Je suis allée à leur rencontre : il était presque plié en 2, marchait lourdement, il avait l'air d'avoir 20 ans de plus, mais heureux d'être enfin sur la terre ferme et il rapportait un thon !

Il a dormi pendant presque 2 jours, se levant seulement pour manger un peu, puis repartait se coucher.

Environ une dizaine de jours après, j'ai rencontré une amie qui m'a appris que son mari (qui est pilote d'hélico à la base), était en alerte ce jour-là, prêt à décoller si les 2 bateaux envoyés sur zone n'avaient pas réussi leur mission. Quelle ne fut pas sa surprise d'apprendre que ce voilier en "perdition" était celui de mon mari, non pas inconscient d'être sorti par des conditions météo aussi mauvaises, mais qu'il était en fait parti depuis une semaine et aurait dû être rentré avant ce déchainement des éléments.

Par la suite, je lui ai demandé qu'il n'aille plus seul à la pêche au thon ; cela ne le satisfaisait pas vraiment d'être accompagné, mais il a compris que je n'avais plus envie de revivre un tel cauchemar : plus tard, il a fait 3 autres campagnes de thons, accompagné…où tout s'est bien passé !

Josy

 

 

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Les Amis de Morvarc'h
  • Le blog des Amis de Morvarc'h a pour mission de communiquer tout au long de la campagne de financement participatif, afin d'assurer la réparation de Morvarc'h lourdement endommagé suite à la tempête Alex, et de le refaire naviguer pour au moins 50 ans !
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